Cendre

Dissection d'un effondrement.

jeudi 16 mars 2017 à 13h03

Un fêlure, encore.

Pourtant, la soirée était comme j’avais voulu.
Un verre à la commune.
On rentre, câlin, on mange, re-câlin.
Lèvres mordues quand j’annonce que c’était ce que je voulais dès le départ.

Pourtant, il y a eu plein de trucs en plus, en sus,
Y’a la question de l’emploi du temps, de sa gestion. La façon dont il évacue ma peur d’être seconde, sans même que je l’énonce. Il me parle d’elle et ça me fait du bien.
Et d’autres bonus, encore : la mise à l’herbe pour le 22 avril, bref échange avec Quartz, et surtout, surtout, son envie d’une rando. Envie qui se pose, qui s’énonce, qui se met en place pragmatiquement dans ma tête, les nuits qui s’ajoutent : une, puis deux, puis la troisième de retour, on parle de la quatrième, celle d’avant, qui est la moins utile.
Je le sens dans l’affirmation de ce que je représente pour lui, dans le désir de concrétiser notre relation, nos aspirations. Et mettre en place quelque chose de simple, et rapide surtout.
Je le sens même un peu en limite de lui même, quand il allonge le nombre de nuits, parle de l’envie de répéter, c’est à dire envisager l’avenir à plus de quelques semaines devant soi : c’est beaucoup, autant pour lui que pour moi, vu nos modes actuels.

Il y avait eu aussi cette énumération, la facilité avec laquelle il s’est plié à l’exercice de me décrire ce qui le touche en moi : Mon humanité (et le soin que je porte aux autres), ma façon de bouger, de m’appuyer dans les cordes, mon physique (un peu beaucoup quand même :P), le partage que j’offre de mes émotions (de mes plaisirs, la façon que j’ai de l’emmener dans tous mes voyages), et enfin, cerise sur le gâteau : il aime la façon dont j’interagis avec lui.

J’ai un peu galérer à remettre dans l’ordre, mais je crois qu’il y a tout

Relation éminemment basée sur l’échange et le partage.

Alors, comment je l’ai laissé me faire mal comme ça.
Au point que les larmes silencieuses coulent à chaque fois que je chante "ces temps-ci"

Deux épreuves, l’une sur l’autre. A propos de "vrais polyamoureux"

ça commence très bien, comme j’aime :
Il me parle d’un article qui évoque un capitalisme relationnel que j’ai déjà lu chez piment du chaos. Où comment plus t’as de relations, plus t’as de demandes, et plus t’as de pouvoir sur les autres qui sont en demandes, toi qui nage dans l’opulence, dans tes privilèges.
Je suis d’accord, j’aime, on en parle, on en discute.

Il continue donc sur les "vrai polyamoureux", ceux qui vivent ensemble à plus de deux, qui prennent vraiment compte les uns des autres.
Première épreuve : le doute que Daewen se préoccupe de moi autant que je me préoccupe d’elle. ça évoque un vieux fond de parano, que je sais alimenté par la sociopathie de mon guerrier : la peur qu’ils se servent de moi, qu’ils m’utilisent, que je sois juste une bonne poire trop gentille pour eux.

ça fait drôle de l’avoir enfin écrit quelque part, ça tiens. Parce que j’en avais peu honte, quand même de penser ça. Et c’est pas gagné encore, parce que si l’accusation s’énonce bien, la défense est encore dure à mettre en mot. M’enfin.
ça m’apprendra à m’attacher à un sociopathe…

Je garde cette première épreuve pour moi, et énonce, tranquillement, que oui, mon guerrier est un polyamoureux + libertinage : c’est à dire qu’il a toujours veillé à présenter ses "principales" les unes aux autres, et à donner les billes aux unes et aux autres pour prendre soin les unes des autres : ce qui est fait du coup avec facilité.
On évoque rapidement le fait que lui ne se revendique pas polyamoureux, seulement du libertinage.
(Comme je le disais à Marlène : pas de foyer)
Il me parle de ce qu’il pense de ceux qui sont à la PdC, du nombre là dedans qui sont juste là pour alimenter leur tableau de chasse et pas construire des relations.
Il me parle du menuisier, comme quoi il serait en mode « je profite au max du truc que je viens de découvrir »
Il me parle de deux autres, qui sont pas en chasse, qu’il faudrait que je chasse moi.
On revient sur la revendication des termes, de l’anarchie relationnelle au polyamour, sur les connotations courantes qui sont associées.
Je lui parle des licornes et de la différence entre les graphes complets et les constellations…

Deuxième épreuve.
Tu veux dormir ? non.
Tu vas bien ? non.
Celle-là, j’ai envie de lui dire. Parce qu’elle me concerne. Mon passé, mes désirs.
De comment j’ai été "vraie polyamoureuse" comme il vient de le décrire, que je le suis plus vraiment aujourd’hui, que j’en ai la nostalgie, nostalgie de mon trouple qui a explosé
Évidence parce que c’est pas la première fois que j’ai ce type de discussion avec lui : mon désir est d’avoir un couple libre : c’est à dire une ancre + liberté de jouer.
Et là, on se rate.
Il y a une marche, je trébuche, il veut me soutenir mais ne fais qu’ajouter du poids dans ma chute.
Il va me dire de partir en chasse. Alors qu’il m’avait promis dimanche matin de ne plus l’évoquer, il me répète qu’il me faut un doudou. Il demande des comptes sur si j’ai invité le roboticien. Il dénonce mes processus : où j’énonce des envies mais ne le fait pas. Il dénonce que j’attends d’être prête pour faire. Que si il me relance pas nos projets ne se concrétiseront pas, alors que j’en ai autant envie que lui. Que je ne sais pas vivre, en fait.
Il me secoue.
Je le laisse faire, sur le coup, parce que c’est une des raisons pour lesquelles je fréquente des SP en ce moment : pour la capacité qu’ils ont à me mettre en mouvement.
Mais il va trop loin, et je suis fragile.
Fragile par la première épreuve qu’il a pas vu. Fragile par la deuxième. Fragile par le souvenir des sanglots de dimanche matin.
Stop arrête. C’est pas vrai. T’as pas le droit de dire ça.
J’vais argumenter. Enoncer. Ce que j’ai mis en place depuis la gale, pour réactiver les personnes en qui je tiens le plus. Et non, y’a pas le roboticien dedans, mais c’est pas pour ça que je lambine.
On a su l’identifier tellement vite, que la gale a mis en évidence une dépendance affective dont nous ne voulons ni l’un ni l’autre.
Oui, j’ai mis en route les processus pour m’en défaire.
Oui, j’ai potentiellement une tendance à laisser un emploi du temps vide au cas où mon doudou viendrait, mais je sais que tu ne veux pas de ce fonctionnement là, et je m’en sors déjà.
Oui, je sais être bien sans toi, je te l’ai écrit pas plus tard que lundi, non ?
Stop arrête, t’as pas le droit de me demander plus, j’y arrive pas. je suis déjà au max.

J’aurais du lui dire clairement : arrête, tu me fais mal.
Peut être qu’il se serait excusé explicitement.

Il est revenu en arrière. Il a commencé par me dire qu’il avait pas compris que c’était vraiment en place, parce que je parlais de projet, et qu’il avait peur que je ne les exécute pas. Il m’a dit qu’il avait besoin d’être rassuré sur ma capacité à faire, et que si je faisais déjà, c’était bien. Que non, il me demandait pas plus. Qu’il me demandait rien, même. Et plus tard, encore, que si ça me faisait du mal, qu’il fallait que je fasse moins.

Métaphore.
deux faces d’une même pièce.
D’un coté une femme libre, indépendante, forte, qui n’a besoin de personne, qui préfère être seule que mal accompagnée.
De l’autre une humaine sensible, attachée, qui cherche le lien social, qui s’appuie sur les autres.
Mais c’est pas comme ça que je l’énonce hier soir, parce que je la méprise à ce moment là. Je la décrit comme faible et dépendante. Et amoureuse.

femme forte

Je méprise la faiblesse, je veux être forte. Mais être forte c’est être seule. L’idée d’être seule me fait fondre en larmes.

Aimer, c’est se rendre vulnérable, c’est accepter l’autre face de la pièce.

Hypothèse : quand j’aime, quand je vais bien, que je suis à l’aplomb de moi même, je suis au centre de la pièce : j’ai accès aux deux faces, et ça alterne de l’un à l’autre, en fonction des besoins des moments.
On énonces mes dépendances, comment je me suis appuyée sur lui, tant à ma rupture de septembre qu’à la mort de mon père. Il répète que c’est ok pour ça, qu’il est là pour moi.

Je m’accroche à une lueur, une étoile solitaire dans ma nuit : il faut que je retrouve le centre de ma pièce, et ça peut vouloir dire accepter à nouveau d’être amoureuse de lui.

Contradiction.

Et les larmes continent de couler silencieusement.
Comme une blessure qui suinte.
Quel est le pu qui s’écoule là ? J’espère au moins que je purge une ancienne infection, mais je ne suis même pas sure.
En tout cas, j’ai pas encore les mots sur ce qui me fait si mal.

J’ai juste ce déclancheur :

T’en fais pas trop pour moe
J’en ai vu d’autre, ch’suis un grand garçon
ça fait longtemps que je fais plus de fausses joe
Je sais qu’ça vire en vrai déception.

[...]

T’étais surement ben mieux qu’un kick
mais c’est pas mal trop compliqué
Si dans l’vie faut savoir prendre des risques
faut savoir aussi s’en aller

ça fait que j’vais fermer ma gueule
Et continuer mon ch’min tout seule
Avec mon coeur dans les shoe-clack
et ton sourire dans mon pack-sac
mais si tu peux m’rappeller pareil
Tu s’ras mon p’tit rayon d’soleil
dans ce monde complètement fucké
où j’aurais p’être eu besoin d’toe.

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