Cendre

207 - Je vais mal

jeudi 13 janvier 2022 à 19h47

Je suis en dépression.
Je le sais, je l’ai sentie venir
En octobre, je cherche un psychiatre, commence à bosser avec mon hypnologue
Fin novembre, les crises sont plus fréquentes, me font plus peur, je retrouve mes recherches précédentes, prend rendez-vous.
Depuis, ça va mieux.
J’aime bien mon psychiatre.
Il me file pas de médoc, mais me dit que j’ai besoin d’émerveillement, de danger, même.
Mais comment peut-on faire semblant de se perdre dans une forêt à la nuit tombée (comme je le faisais en rentrant du SSR ou mourrait Papa), comment trouver ce prodige dans Paris ?
Louchez un peu ?
un bandeau et une canne blanche ?
J’essaye sans mes lunettes… ça fatigue plus, mais je suis pas convaincue.

J’ai pas vu mon hypno depuis un certain temps : il y a eu les fêtes, puis sa dernière chute. J’ose pas réclamer (alors que j’en ai envie un peu quand même) heureusement, il garde un très bon contact avec moi par ailleurs, entre autre quand il nous restitue le cours qu’il suit.

Et hier, on a bossé sur les besoins.

Deux constats sautent aux yeux.

Le plus évident, qu’on a vu en séance hier : Place des cordes remplissait chez moi les 6 besoins fondamentaux selon Anthony Robbins
Sécurité  : ce lieu m’a servi de refuge plus d’une fois. toujours ouvert, on m’offre un thé et une couverture pour aller bouquiner dans les canapé là-haut
Variété  : ai-je vraiment besoin de décrire !
Importance  : je suis vite devenue importante, pour certains, et pour le lieu même à la fin : on m’a demandé de m’investir, tenir l’agenda du comptoir, donner des cours même !
connexion et amour : extraordinairement varié étaient les liens que j’ai tissé en ces lieux, des plus éphémères aux plus constants.
épanouissement croissance : je passais mon temps là bah à apprendre, à prendre des nouveaux rôles (modèle, puis rigueur, puis prof, puis médiatrice, etc...)
contribution  : sans effort, j’ai participé à la vie de ce lieu, depuis les élément mineurs, comme y mettre ma play-list quand je tenais le comptoir, aux éléments plus majeur, quand je vais apprendre la comptabilité du lieu dans l’espoir de le sauver.

6 besoins fondamentaux, rempli par ce lieu et les personnes qui l’animait, à niveau que j’avais rarement vécu dans ma vie.
Tu m’étonnes que je vive très très mal cette fermeture !! !

Le deuxième, beaucoup plus sournois, c’est insinumé à la clope d’hier, après la séance.
En réfléchissant à la question "est-ce que mes choix remplissent mes besoins"
Et la réponse, éclatante :
La totalité de mes choix actuels qui embolisent ma réflexions est pour l’aménagement de la Rabouillère, et cela ne comble aucun besoin fondamental chez moi.
Au contraire.
J’avais, de par mes héritages successifs, un matelas de 300 000€. A la place, j’ai maintenant une dette de 18 ans, que je ne peux pas rembourser seule, je dépend de mon compagnon pour finir de rembourner.
Nous avons perdu dans la nature a peu près 115 000€ : 30 000€ de frais d’agence, 45 000€ de contribution à l’état (aussi appelés frais de notraires), et je compte la moitié des travaux, donc 40 000€, comme du superflu qu’on arrivera jamais à répercuter sur un éventuel prix de vente.
Et tout ça pourquoi ?
Pour spéculer sur l’avenir.

Moi, mes 300 000€, ils auraient fondu les années maigres, grossi les années fastes, et auraient payé ma fin de vie suffisamment jusqu’à ce que je demande à ce qu’on me laisse mourir en paix.
Mais au lieu de ça, je me suis laissée entrainée par les sirènes de la finances, qui disent qu’il y a pas meilleur placement que la pierre, et que la pierre est même le seul placement où une banque accepte de te prêter pour investir. et donc profiter de l’effet de levier.
C’est pour ça qu’on s’est endetté.
Pour profiter de l’effet de levier => c’est à dire investir tout de suite avec de l’argent qu’on rendra plus tard, quand l’investissement commencera à porter ses fruits.

Et ben, bien que ma famille, elle aussi, considérait qu’acheter dans la pierre était la première chose à faire quand on avait un peu de sous de coté, et ben, ça faisait vraiment pas partie de mes besoins fondamentaux.
Et quand je me suis lancée là dedans, je me doutais que ça serait fatiguant, mais pas à ce point là.
Et je travaille dur depuis plus d’un an. Pour un truc qui ne s’est jamais exprimé comme un besoin primaire.

Je l’ai fait pour lui plaire.
Comme j’ai accepté les dépenses déraisonnables, les carrelages, les parquets, comme j’ai accepté ses choix, la grande baignoire (moi qui n’ai besoin que d’un baquet), avec ses grands yeux de lapin "ça sera mieux, non ?"
Qu’est-ce que j’ai choisi pour moi là dedans en fait ?
Bon, je suis injuste.
J’ai choisi l’appartement, déjà. la vue, le ciel, la coulée verte. C’est moi qui ai dit "on fait une offre au prix", et on l’a eu.
J’ai choisi le rétro éclairage (qui est loin loin d’être en œuvre, mais ça va se faire)
J’ai imposé une cuisine pas hors de prix.
Avant hier, j’ai choisi le grand frigo et le lave vaisselle miele.

Mais qu’il revienne avec ses lubies de fond d’armoires qui se décollent en refusant l’option conseillée par tous qui est de ne pas mettre de plinthes.... Voilà. J’ai réalisé toutes les concessions que j’avais fait, depuis un an, pour ce projet qui n’est pas exactement le mien, dans lequel je ne me reconnais pas.

La goutte qui fait déborder le vase.
Qui me fait dire qu’il dépense mon argent sans compter depuis le début. Qu’il réalise seulement depuis peu qu’on est finalement court (bah oui, en prenant 30% plus cher sur chaque poste, oui, on explose le budget, c’est logique), qu’il va devoir retrouver du boulot fissa (bah oui, dès le mois prochain, on va payer les traites plein pôt)
Mes sous. C’est avec mes économies qu’on paye ses goûts de luxe de petit bourgeois de province.

Quand je pense qu’il m’avait tancé tout au début parce que j’avais osé émettre l’idée que je voulais choisir une banque éthique (et donc refuser les mastodontes dégueulasses)

Je l’aime.
Mais Punaise, ça fait mal.

Tu m’étonnes que je vais mal........................

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